Mobilités quotidiennes entre le domicile et le lieu de travail – Etat des lieux des sources disponibles en Belgique
Thomas Ermans  1@  , Céline Brandeleer  1@  , Michel Hubert  1@  
1 : Centre d'études sociologiques  (CES)  -  Site web

Historiquement, la Belgique a très tôt encouragé les déplacements domicile-travail entre polarités urbaines et hinterland rural sur des distances assez longues, à laquelle il est couramment fait référence par « mouvement pendulaire » ou « navette quotidienne ». Au 19e siècle, la concentration de l'emploi dans les centres urbains a été accompagnée, à partir de 1870, de l'introduction des abonnements de chemin de fer à bas prix, minimisant par là l'exode rural en permettant à de nombreux travailleurs de coupler un salaire urbain à une vie rurale bon marché, où l'ouvrier pouvait de surcroît conserver une petite activité agricole. Après la Seconde Guerre Mondiale, la périurbanisation des espaces ruraux fait définitivement entrer dans la norme le phénomène de la navette quotidienne. Parallèlement, la collecte de données sur celle-ci a été assurée, elle aussi très tôt, par les recensements de la population et une première représentation en est faite dès 1896, dans l'atlas statistique du recensement général des industries et des métiers.

En interrogeant systématiquement l'ensemble de la population à propos de son lieu de travail (caractéristiques, etc.) mais aussi de ses modalités de déplacement (mode de transport, distance du trajet, temps de parcours, etc.), les recensements décennaux constituaient une mine d'information aussi bien quantitative que qualitative. Le dernier exercice de ce type a été réalisé en 2001, année après laquelle il a été décidé de le remplacer par la mise en réseau de divers registres administratifs, dont l'ambition se limite désormais aux exigences européennes en matière de recensement de la population et des logements. Le premier recensement de ce type a été réalisé en 2015 et porte sur l'année 2011. Il s'agit du Census 2011.

Dès lors, les données recueillies ne permettent plus d'aborder la question de la mobilité quotidienne entre le domicile et le lieu de travail que sous l'angle des bassins d'emplois et il faut désormais se tourner vers les données d'enquêtes pour obtenir l'information sur les modalités de ces navettes. En Belgique, trois ensembles d'enquêtes ont permis d'enregistrer les comportements de mobilité des personnes, en particulier pour les déplacements domicile - travail. Premièrement, l'enquête réalisée à l'initiative de l'administration fédérale de la politique scientifique et/ou de la mobilité et des transports, menée deux fois, en 1999 (MOBEL) et en 2010 (Beldam). Deuxièmement, l'enquête organisée par la Région flamande (Onderzoek verplaatsingsgedrag), collectée en continu depuis 2008. Enfin, troisièmement, l'Enquête Forces de Travail, qui est répétée chaque année et a été complétée par un petit module sur les comportements de mobilité pour les déplacements entre le domicile et le lieu de travail, dont la formulation est calquée sur les questions auparavant posées dans les recensements classiques et les enquêtes de mobilité.

Pour compléter le tableau des sources « traditionnelles », il faut encore mentionner les données issues des plans de déplacements en entreprise qui sont exigés de toutes les entreprises de plus de 100 travailleurs pour leurs sites de plus de 30 travailleurs.

La fin des recensements classiques entraîne ainsi une recomposition de l'offre de données. Nous souhaitons dès lors dans cette contribution, dans un premier temps, établir un inventaire comparatif des sources « traditionnelles » de données sur la mobilité spatiale quotidienne en Belgique pour les déplacements domicile-travail pour, dans un second temps, proposer une réflexion sur ce que ces différentes sources impliquent en termes de définition et de mesure des volumes de déplacements domicile-travail.

La comparaison des sources se fera sur base de plusieurs critères relatifs à leur structure (populations visées, degré d'exhaustivité, unité d'agrégation des données, etc.) mais aussi à l'information qu'elles reprennent, aux indicateurs qu'elles permettent de produire et leur échelle.

Enfin, on se penchera sur la définition du déplacement domicile-travail dans les différentes sources et de son rapport avec le concept de « navette quotidienne » qui revêt un critère de distance (franchissement d'au moins une limite communale) et de régularité (au moins 4 fois par semaines encore en 1991). Dans les registres administratifs, ils sont identifiés de manière implicite sur base du lieu de travail et du lieu de domicile et constituent dans ce cas une image des flux pour un jour où tous les travailleurs se rendraient sur leur lieu de travail depuis leur domicile.

L'objectif sera ici, à l'aide des sources d'enquêtes (EFT, Beldam) et, plus spécifiquement, pour la population des navettes entrantes vers la Région de Bruxelles-Capitale, de pondérer les flux « administratifs » d'un facteur de fréquence hebdomadaire de déplacement. Celui-ci prendra notamment en compte les effets de structure sectorielle liés au régime de travail (temps plein, temps partiel), à l'absence au travail et à la pratique du télétravail. On traitera aussi la question du cumul de plusieurs emplois ainsi que la problématique des départs depuis un autre lieu que le lieu de domicile.


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